Jean-Michel Blanquer : « Les métiers d’avenir sont ceux qui correspondent aux défis d’avenir de notre société »
À l’occasion du lancement de l’année de la Chimie, le ministère de l’Éducation nationale recevait en ses murs un « laboratoire éphémère », le mercredi 6 février. Des étudiants de BTS Chimie ont initié des élèves de CM2
à l’expérimentation. Il s'est entretenu avec Hydrogenium à propos de l'enseignement scientifique et des métiers d'avenir.
Avec ce laboratoire éphémère, des enfants découvrent les sciences pour la première fois. En quoi cette expérimentation pratique et ludique est-elle importante ?
Jean-Michel Blanquer : Il y a plusieurs intérêts à des ateliers de ce type : le premier c’est de valoriser la chimie, qui est une discipline fondamentale dans tous les sens du terme. On a besoin de montrer que c’est à la fois très intéressant et très vivant. Le deuxième intérêt est de montrer qu’une culture scientifique peut s’ancrer dès l’école primaire, et le troisième c’est d’avoir des démonstrations qui sont faites par des étudiants de BTS à des élèves de l’école primaire. C’est toujours excellent, sur le plan pédagogique, d’avoir de jeunes étudiants qui aident des plus jeunes qu’eux. C’est bon pour les uns et pour les autres ; que la chimie soit à la pointe de ce type de pratiques pédagogiques est un très bon signal. Évidemment nous voulons souligner l’importance de la chimie, des sciences en général, de la méthode expérimentale et de l’esprit scientifique dans notre système scolaire.
Avec la transition écologique nous allons avoir besoin de plus en plus de techniciens et d’ingénieurs. Comment encourager les plus jeunes à s’orienter dans ces filières ?
J-M. B. : Il est très important que dès le début de la vie, à l’école maternelle, se développe l’esprit scientifique, qui consiste à manipuler, à se poser des questions, à expérimenter, à travailler en équipe pour trouver des solutions à des problèmes. Toutes ces approches sont des approches pédagogiques fondamentales qui correspondent à la démarche scientifique. Elles doivent devenir naturelles, des réflexes pour les enfants, grâce aux activités qu’ils ont en classe. Cela commence par exemple avec des concepts mathématiques, en manipulant des objets, par la compréhension de ce qu’il y a derrière les objets. La chimie est au cœur de cette démarche mentale. Nous devons ancrer cela dès le début et c’est le sens de beaucoup de choses qui sont faites depuis un certain nombre d’années, comme la fondation « la main à la pâte », l’ensemble des évolutions des programmes du premier degré, et la place qui est faite aux sciences et à l’éveil scientifique. Maintenant on doit renforcer cette démarche ; c’est aussi le sens de la réforme du lycée dans les trois filières : générale, professionnelle et technologique. Au lycée général, par exemple, la rénovation des programmes de physique chimie va, je l’espère, attirer plus d’élèves en physique chimie, et les amener vers les carrières scientifiques.
En quoi la valorisation des métiers de demain s’intègre-t-elle dans une démarche gouvernementale, concertée avec d’autres ministres ?
J-M. B. : Évidemment, c’est une démarche conjointe. Tout d’abord, nous échangeons beaucoup avec l’Enseignement supérieur, de manière évidente, car ce domaine a une influence directe sur notre manière de concevoir les cursus du système scolaire et notamment du lycée. Cette volonté est également présente avec le ministère de la Transition écologique et solidaire : je ferai d’ailleurs prochainement un déplacement autour de ces questions avec Brune Poirson. Dans ce cas l’objectif est de montrer les métiers de la transition écologique, ce qui nous renvoie aussi beaucoup à ce que nous allons faire pour l’enseignement professionnel. Nous insistons sur la création de nouveaux campus rassemblant des institutions d’enseignement supérieur, des lycées professionnels, des laboratoires, des centres de recherche, des incubateurs d’entreprise. Bref, toutes sortes de choses, le plus possible dans un même lieu, autour de grands thèmes et notamment de la transition écologique. Les métiers se renouvellent en permanence, et les grands métiers d’avenir sont aussi ceux qui correspondent aux grands défis d’avenir de notre société. Il y a deux grandes révolutions particulièrement importantes dans notre époque, ce sont la transition écologique, et la transition numérique. Dans les deux cas, a fortiori en croisant les deux, on a beaucoup de mutations des métiers qui ont un impact sur le contenu des formations. Celles-ci doivent à la fois s’élaborer, c’est le sens des réformes de l’éducation nationales, et cela doit aussi être visible : la population doit le voir et le comprendre, les élèves doivent l’expérimenter.