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Innovations

Daniel Marenne : L’eldorado des e-fuels

Grace aux quotas européens, les e-fuels* permettent de développer un écosystème qui fonctionne. Explications d’un expert.

Daniel Marenne, Engie
Daniel Marenne
Architecte de solutions énergétiques d’Engie

On est un groupe mondial actif à peu de choses près partout dans le monde. On a des objectifs relativement ambitieux, notamment sur la production d’énergie renouvelable ( EnR ). On va d’ici à 2025 augmenter chaque année de 4 gigawatts la production d’EnR sur l’ensemble des régions d’Engie. À partir de 2025, on va accélérer et on va être à 6 gigas. Cet objectif ne pourra s’accompagner qu’avec des possibilités de stocker l’énergie. On a des objectifs ambitieux aussi de développement de batteries, parce que les batteries vont permettent d’écrêter la base de l’énergie. Mais quand on a plus assez de batterie, il faut transformer l’électricité en hydrogène ( H2 ). Mais une fois que vous l’avez transformé en hydrogène, il faudra aussi la transporter et la stocker. On a en parallèle un objectif de 700 km de pipelines à construire. On va commencer en France a priori avec 1 TW/H de stockage d’hydrogène en cavité saline. Transformer l’hydrogène qui provient des EnR, si on ne sait pas le stocker, en gros, ça ne sert strictement à rien. Il faut absolument à un moment ou un autre stocker cette énergie.
C’est un secret pour personne que l’hydrogène renouvelable, ça coûte de l’argent. Ce n’est pas spécialement quelque chose de rentable. On a donc intérêt à ce qu’on regarde vers où on va aller vendre cet hydrogène. Si on regarde les utilisations existantes d’hydrogène renouvelable que sont l’ammoniac ou les raffineries, on va dire que le bénéfice chez les industriels n’est pas énorme, notamment sur les fertilisants. Dès que le prix de l’hydrogène augmente, les fertilisants arrêtent leurs usines. On l’a vu en 2022 au niveau européen, dès que le gaz a augmenté, on a arrêté les usines de fertilisants. Il y en a même qui ont été arrêtés définitivement. Au niveau de l’industrie, on a effectivement l’acier qui va pouvoir consommer de plus en plus d’hydrogène. Mais voilà, il faut d’abord construire les nouveaux fours et ça va quand même prendre du temps. Et il faut que le client soit prêt à payer la surprime, ce qui n’est pas toujours évident. Parce que les clients, ils sont gentils, ils demandent de décarboner, mais en général ils disent aussi que c’est cher. C’est quand même un peu un problème !

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**Propos recueillis lors du séminaire ADEME/NEDO Japan sur la décarbonation de l’industrie via l’H2 bas carbone, le 20 novembre 2023 à Dunkerque. Avec Jean GRAVELLIER, Directeur Général de POLENERGIE Dunkerque.

Et alors ? On a les e-fuels ! Le gros avantage, c’est que la réglementation européenne a instauré des quotas. Vous arrivez dans un monde où il n’y a pas vraiment un concurrent fossile étant donné que vous êtes directement sur des concurrents qui sont des bios. Du coup, cela permet de développer un écosystème qui fonctionne. Quand on fait des e-fuels, en plus, c’est qu’on rentre dans un marché qui existe avec des stockages qui existent, avec des pipelines qui existent, avec des utilisateurs qui existent. En gros, ça n’a a priori que des avantages. Le SAF c’est fondamental parce qu’au niveau du marché H2, aujourd’hui, c’est vraiment le seul marché où quand vous allez voir un client, la question n’est pas de savoir combien ça coûte, mais combien vous allez produire et quand. C’est quand même assez satisfaisant pour un développeur de projet d’avoir ce type de questions.

*E-fuel (ou SAF pour le secteur aéronautique : sustainable aviation fuels) : carburants de synthèse fabriqués à partir de biomasse ou de CO2 et d’H2 produit à partir d’électricité renouvelable. Le C02 est prélevé directement dans l’atmosphère ou capturé dans des installations industrielles. Les e-fuels sont utilisés également pour décarboner le transport maritime.

 

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